PEINDRE À L'HUILE

La fin du Moyen-âge voit la naissance de cette nouvelle technique de peinture qui va remplacer progressivement la tempera à l'œuf. Cette nouvelle technique, bien qu'elle permette un naturalisme plus poussé et soit utilisée à cet effet, naît d'un besoin qui est essentiellement symbolique: comment montrer que la Lumière est à l'origine des choses visibles? L'atmosphère culturelle de cette époque est caractérisée par une réflexion sur la Lumière divine en tant qu'agent créateur et cela se répercute sur le plan des arts, en architecture on a l'élaboration du gothique avec une large place au fenêtres qui sont traversées par la lumière et aux vitraux; en peinture cette méditation conduit à l'élaboration de la peinture à l'huile. 
L'image était concrètement réalisée de la façon suivante: la planche qui servait de support était préparée avec un mélange de plâtre et de colle qui, une fois sec, était blanchi, sur cette craie blanche un dessin était tracé, parfois à la pointe d'argent, d'autres fois avec un pinceau. Une couche transparente d'un vernis entre le marron, l'orange et l'or était ensuite étalée sur l'ensemble, qui avait pour fonction de laisser transparaître la brillance du blanc, mais de permettre plus facilement aux couleurs superposées d'être couvrants. En fait, les couleurs étaient utilisées en glacis, qui est la caractéristique distinctive et caractéristique de la peinture à l'huile, c'est-à-dire qu'elles étaient appliquées en couches transparentes et ne couvraient jamais complètement, en fait sous de nombreuses peintures flamandes, vous pouvez toujours lire le dessin sous-jacent à travers les couches transparentes de couleur. Il fallait laisser sécher chaque couche de peinture avant de pouvoir passer à la couche suivante, c'est pourquoi un grand polyptyque nécessitait souvent quelques années de travail.

 

PEINTURE DU XVIIème

Le naturalisme du XVIIème siècle constitue l'apogée de notre civilisation; il se forme en partie sur le prolongement d'une première recognition de vérité morale et optique faite au sein de l'idéalisme de la Renaissance, et en partie en réaction à ce dernier. Du point de vue thématique on voit se développer et se constituer comme genre les tableaux de nature morte d'objets, de fleurs et de fruits, les tables servies, et bien sûr, comme cas particulier de nature morte, les vanités. 

Sous l'aspect technique, à la palette déjà utilisée à la Renaissance, s'ajoutent la terre de Cassel, les teintes « de Mars », allant du jaune au brun en passant par l’orangé, le rouge et une sorte de pourpre chocolat, le violet de Mars, les ocres, les terres et le noir.  Des innovations importantes surviennent pour les jaunes avec l'introduction de nouveaux pigments en provenance des terres orientales.

L'importance qu'on a vu accorder à la Lumière dans l'acte même de naissance de la peinture à l'huile fait son entrée dans la mise en scène des images qui est régie par le clair-obscur et et une tonalité générale plus sombre contre les couleurs très pures et lumineuses de la période précédente. 

La figure de l'artiste atteint le maximum de sa professionnalisation, surtout dans les pays du Nord où l'artiste de talent peut accumuler une véritable fortune et vivre comme un notable. Les œuvres d'art sont considérées comme des biens et ont leur marché comme tout autre bien ou produit, tandis que dans les pays de tradition plus "classique" et méditerranéens l'art jouis d'une sorte d'aura de prestige mais l'artiste continue à être considéré un simple ouvrier, sans différences substantielles par rapport au Moyen-âge. 

 

LA NATURE MORTE

Les objets commencent à faire leur apparition dans la peinture comme éléments symboliques servant à souligner les vertus de la Vierge par exemple, comme les lys ou les violettes, mais il faudra longtemps pour qu'ils se dégagent de cette fonction d'accessoires en assumant un rôle autonome. Des crânes font leur apparition au verso des portraits, à rappeler de ne pas trop se vanter de son titre et de sa fortune. 

Entre la fin du XVIème siècle et le début du XVIIème on voit apparaître les premières natures mortes autonomes dont la première signée et datée date du 1602 (Fede Galizia issue de la culture lombarde), même si une tradition du genre documentée existait déjà avant cette date. 

Les objets se décontextualisent pour se créer leur propre espace avec ses lois, sa composition, sa logique interne; ce ne sont plus de simples accessoires d'un sens primaire mais viennent, en tant que protagonistes, sur le devant de la scène. Les verres, les fleurs, les crânes, les livres, les coupes et les coquillages, écrivent leur propre histoire désormais, en pleine autonomie avec une signification symbolique toujours présente même si plus ou moins évidente à déchiffrer. 

 

LA VANITÉ

À partir de leur premières apparitions au verso des portrait ou dans les représentations du Calvaire et de Saint Jérôme, les crânes se lient petit à petit à d'autres objets porteurs de sens et s'organisent en images autonomes puisant leur force symbolique et leur signification dans les sources scripturales et littéraires de la grande tradition de la vanité: Ecclésiaste, Livre de Job, mais aussi une multitude de philosophes et hommes de lettres que depuis l'antiquité classique à la Renaissance n'ont jamais cessé de s'exprimer sur le sujet. 

À l'intérieur du genre naissant de la nature morte, un nouveau sous-genre est né: la vanité. Ce thème générale se décline sur deux grandes lignes, la vanitas proprement dite qui rappelle le caractère éphémère des biens et des plaisirs; et le memento mori qui pose plus l'accent sur la mémoire et donc la conscience que tout un chacun devrait avoir de sa propre mortalité. 

 

QUELQUES GRANDS MAÎTRES

Le XVIIème siècle n'est pas appelé le Siècle d'Or par hasard, les Maîtres abondent et leur travail est très souvent d'une qualité exquise, en partie à cause de la formation qui est encore très sérieuse et valable à cette époque, en partie à cause du marché qui est très exigeant. Nous nous limiterons ici à fournir quelques exemples de peintres de fleurs et de vanités qui ont été une source d'inspiration. 

 

1. Nicolas van Verendael (Anvers 19 février 1640 - 11 août 1691)

Il est le fils du peintre Guillaume van Verendael qui lui a transmis les premiers éléments de la peinture.

Il a, par la suite, peint surtout des fleurs, si l'on excepte quelque scène de singeries, en développant son propre style personnel qui est caractérisé par une perspicuité optique qui est au même temps pleine de poésie dans le rendu de la délicatesse et du jeu de la lumière sur les pétales.  Un peintre exceptionnel que je considère mon Maître spirituel. 

 

2. Jan Davidsz de Heem (Utrecht 1606-Anvers 1684)

Ses premières œuvres sont dans le style de Balthasar van der Ast (1593/94-1657), son maître. Par la suite De Heem mettra au point un naturalisme très raffiné, au même temps poussé dans les détails et plein de verve, avec de très belles compositions dans des genres variés: fleurs, vanités, petits banquets et tables d'apparat. L'un des meilleurs peintre du siècle avec une  production impressionnante et une qualité qui se maintient constante tout le long de son oeuvre.  

 

3. David Bailly (Leyde 1584-1657)

Ce peintre a été très actif comme portraitiste et a joué un rôle essentiel dans le développement de la peinture de vanité, en formant à ce genre deux autres peintres, ses neveux et élèves Harmen et Pieter Steenwijck. Bailly a développé un style d'une grande élégance en réalisant des compositions parfois complexes comme son autoportrait à deux âges différents avec objets de vanité. 

 

4. Hendrick Andriessen (Anvers 1607-Anvers ou Zélande 1655)

Ce peintre s'est spécialisé dans les vanités en peignant des pièces parmi les plus belles du siècle. On pense qu'il souffrait d'une malformation congénitale car dans certains documents est mentionné comme "limping Henry", Henry le boiteux. Sa qualité est exceptionnelle aussi bien dans les petites composition que dans les vanités monumentales.